De la route au trail …
Après 18 mois sans mettre un dossard et plusieurs préparations en vain, l’Ecotrail se présente un peu par hasard dans le calendrier, la course semble être maintenue, juste à côté de la maison, pas besoin de réserver de transport et de logement, les copains se lancent… une soirée de réflexion… le 18km ou le 30 km… Même si le 18 km semble le plus accessible et le plus cohérent par rapport à la forme actuelle, le parcours et l’arrivée du 30km devant la Tour Eiffel et il faut le dire la perspective d’obtenir le premier point ITRA (référence du traileur !) ont rapidement dirigé le choix, ce sera un 30 km !!
Du jour au lendemain, je deviens un traileur, je vais au magasin Trail And The City, j’achète des chaussures de trail. Dès le weekend je regarde le dénivelé lors de mes sorties au bois de Boulogne. La semaine suivante j’achète le sac à dos de trail Salomon. Dans le mois de préparation, il n’y a pas beaucoup de km mais quelques sorties spécifiques à Meudon, côte des gardes et bois, ça change ! Ce fut un mois d’évasion et de plaisir avec les copains du club pour préparer ce trail. De la découverte sans pression à faire comme si c’était l’UTMB !
Dernière semaine très light, 10 km tranquille et une 2ème dose Pfizer. Je récupère le dossard, avec l’ambiance particulière de cette veille de course qui donne envie d’être sur la ligne de départ. Je demande un changement de sas pour partir devant, même si je n’ai pas de référence en trail et très peu de repères sur les longues distances (ok ce n’est pas de l’ultra mais 30 bornes ça ne m’arrive pas tous les jeudis non plus !). Un des plaisirs dans la course à pied c’est aussi de pouvoir jouer devant, la tactique et la gestion de l’effort deviennent plus importantes lorsqu’on met le chrono de côté. En partant devant ça ouvrait cette possibilité !
Une première partie payante !
Ça y est, jour de course, je retrouve par hasard des coureurs du club avant le départ, plus sympa pour patienter. Pas le temps de s’échauffer, il fallait entrer dans le SAS 30 minutes avant le départ, et seulement les 250 premiers pouvaient y accéder. Échauffement statique… mouais pas trop fan, en même temps pas certain d’avoir 30 km dans les jambes alors en ajouter 3 ou 4 de plus ce n’est pas forcément nécessaire.
Départ en contrôle mais plutôt rapide quand même surtout à froid, autour de la 10ème place, environ 4’/km sur la première portion plate, petite côte 100m puis longues allées forestières plates ou léger faux plat montant, de quoi envoyer du rythme. Je suis un gars (futur 4ème) au look plutôt routier (Nike zoom quelque chose aux pieds) qui remonte progressivement les concurrents, on se retrouve pendant quelques km avec un grand (futur 3ème) à l’allure de trailer confirmé, bien équipé mais rien qui sent le neuf. On se retrouve assez rapidement vers le km 5/6, on est toujours tous les 3 et on voit les 2 premiers devant nous depuis le début, 100 et 200 m plus loin.
Sur les longues allées, c’était vraiment bien d’être avec le petit groupe par contre en descente le grand nous allumait et je n’étais pas à l’aise en dernière position, sans pouvoir vraiment anticiper sur les appuis et les trajectoires. Sans trop forcer je recolle après chaque côte et après chaque descente, même si je me demande bien si je peux tenir encore 25 km comme ça. On est autour de 4’15/km mais il n’y a pas de grosses difficultés non plus. Il y a encore de bonnes lignes droites, je prends un relais et sans trop faire attention on laisse le grand derrière, et on se rapproche du second. On le double même peu avant le passage au premier check point, je suis alors 2ème mais toujours accompagné par Nadir (futur 4ème).
Les portions ne sont pas trop techniques et on se rapproche progressivement du premier. Le chrono me montre qu’on n’est pas super rapides non plus, disons dans les temps espérés. Pas d’inquiétude. En fait, on dépasse le premier dans une côte sèche vers le Km 8, en le doublant, il marche, et nous dit qu’il est explosé. Au sommet de la côte je me retourne, plus personne, je suis en tête ! alors là, c’était un peu fou, complètement inespéré, je ne m’affole pas, sauf que depuis le début, j’avais des concurrents devant moi il fallait juste suivre, là, je dois regarder le balisage, à chaque croisement, lever la tête, vérifier, rester vigilant, le pire c’est dans les descente, il fallait sans arrêt regarder les pieds et plus loin devant pour anticiper … franchement pas très agréable, et les intersections avec les bénévoles (Merci à eux, mille fois) qui regardent leur portable, bon je les comprends et j’voulais pas être trop relou : « bonjour, pardon, c’est par où ? » bref moment plaisant mais pas si apaisé, je ne savais pas quelle avance j’avais vraiment, là je commence à remonter les derniers participants du trail de 45 km, on papote parfois, rapidement, et on s’encourage, très sympa !.
La lutte en tête
En étudiant le parcours j’avais vu qu’au km 12 on devait être au point le plus haut, qu’ensuite il y avait plus de descente, en gros, j’avais surtout voulu gérer mon effort pour arriver correctement au km 12. Ensuite je me disais 6km dans les bois avec des longues descentes et quelques petites côtes, un ravitaillement au 18 puis 12 km de plat sur les quais où on peut envoyer. Voilà l’Ecotrail 30km vu depuis mon canapé.
Je suis toujours en tête au km 12, je n’ai pas l’impression d’envoyer (d’ailleurs Strava montre bien qu’entre le 8ème et le 15ème j’ai largement ralenti l’allure), je sens que le rythme est correct, j’essaie de m’alimenter (pâte de fruits) mais pas très agréable, je n’ai plus d’eau ça commence à manquer. Vers le km 15, on retrouve une portion plus dur le long d’un parc, on est en ville, de longs trottoirs, les balisages sont moins nets, il y a plus de bénévoles, on arrive à la mi-course et je commence à trouver le temps long, surtout me dire : « encore 15 km » … les jambes sont un peu lourdes, je sens aussi que je perds en lucidité, je m’agace à chaque changement de direction.
Au bout d’une avenue je ne vois pas de balisage, je ne sais pas s’il faut prendre à droite ou à gauche, au sol il y a des flèches, puis une croix… je voulais suivre les flèches mais pourquoi cette croix ? je ne vois pas de balisages au mur comme il y avait, accrochés, sur les arbres dans la forêt. Je reviens en arrière, j’aperçois un peu plus loin 2 concurrents qui arrivent dans ma direction, rassuré je repars dans l’autre sens, suis les flèches et retrouve un peu plus loin le balisage recherché, 10/15 sec de perdues au moins et un peu d’agacement, les 2 concurrents me rejoignent peu de temps après (il y a Nadir et la première féminine).
Le métier qui rentre
Je m’accroche à eux et 2 autres participants arrivent 1 km plus loin. Là ça relance fort et je sens que j’ai besoin d’un second souffle, de boire également, je sens surtout que je ne pourrai pas suivre ce rythme très longtemps, le chemin est encore long. Je les laisse partir et en bas d’une descente un point ravitaillement en eau ! Km 17. J’ai rarement bu avec autant de plaisir, 2 verres d’eau, trop bien, mais également voulu remplir les flasques du gilet de trail… alors entre la fatigue, la précipitation et certainement beaucoup de maladresse ce fut un désastre, j’en ai mis partout, la flasque ne se remplissait pas, j’aurais peut-être dû la sortir du gilet, mais bon, j’ai fait une pause, bu un peu, personne ne m’a doublé pendant ce temps, et j’ai pu repartir, sans l’espoir de rattraper le groupe des 4 de devant, loin maintenant, le problème c’est que je n’avais de nouveau personne à suivre, même si le parcours se densifiait progressivement des concurrents du 45km.
A mon rythme, j’espérais ne pas me faire trop souvent doubler, j’espérais presque pouvoir retrouver quelqu’un pour m’accrocher et me relancer. Là c’était devenu en l’espace de 2/3 km une ambiance fin de marathon, avec plus de gaz, et l’impression de devoir relancer sans arrêt sinon le rythme baissait naturellement. Aucune douleur musculaire par contre, moins de souplesse c’est certain mais pas de crampe, les mollets ok et les articulations ok. Les pieds, bon, on ne va pas se plaindre mais disons qu’ils n’étaient pas prêts à ça, quelques ampoules, un peu gênantes, mais rien d’horrible. Bon matériel, toujours en confiance sur les appuis notamment en descente !
Km 18/19, je traîne ma peine, les jambes lourdes, pas de rythme, là, l’embout de la flasque tombe, je reviens sur mes pas, je la ramasse, la flasque finit de se vider, je la referme et je vois un duo me doubler. J’essaie de les accrocher, ce n’est pas naturel, mais cela m’oblige à relancer l’allure, sur le plat et dans une descente pas de soucis je m’accroche (je pense être 7ème mais dans le duo il y a un accompagnateur). Là, j’avais encore mal regardé le road book car dans saint cloud, avant d’aller chercher le ravito du 20ème (pas du 18ème comme je le pensais), il y a un beau mur devant nous, je prends un éclat, je laisse partir le duo. J’ai soif. Et je regrette un peu mon choix du parcours de 30km au lieu du 18km, à ce moment-là je trouvais ça très fun d’arriver au parc Saint-Cloud !
Il fait vraiment soif
En haut du mur, km 20, c’est le deuxième check point, j’suis 6ème, et ravito. Sauf qu’au ravito je vois que le duo devant ne s’est pas arrêté et l’organisation me donne une balise à mettre dans mon sac, j’essaie de la mettre tout en courant et me voilà sorti du ravito sans m’être arrêté non plus! Manque de lucidité aussi et surtout ! j’ai toujours soif, il me reste une ou deux gorgées dans la seule flasque moitié remplie puis moitié vidée… ça descend, j’ai une balise dans le dos, on relance… ou pas.
En fait il y a encore tout une partie dans le parc de saint cloud, plutôt descendante mais là je me fais doubler par un gars que je ne peux même pas essayer de suivre, je passe 7ème, j’ai même tout le mal du monde à aller plus vite que les derniers participants du 45 km ! Je sens que ça va être long. A la sortie du parc km 22 un gars me rejoint, il me confirme qu’à sa montre aussi il ne reste que 8km, je suis un peu rassuré car depuis mon canapé la veille j’avais dit 12km de plat sur les quais pour finir… c’était 8km, petit soulagement, sinon je n’étais pas loin de balancer la montre !!
Pour rejoindre les quais, ambiance urbaine, ça surprend, et petit raté pour choper des escaliers sur la gauche, demi-tour et je retrouve le concurrent que j’avais essayé de semer quelques mètres auparavant quand dans un moment d’égarement je m’étais dit : « vas-y maintenant c’est plat rentre vite à la maison », finalement je reste sagement derrière lui, puis je galère à rester derrière, puis ça devient l’enfer, je regarde ma montre tous les 200m, les km ne défilent pas du tout.
On arrive au niveau de l’île saint germain, km 25, un enchainement d’escaliers et de relances me font perdre le contact avec le gars, je suis 8ème (dans ma tête je suis 9ème) et j’espère pouvoir encore finir dans le top 10. Depuis un moment je me suis rendu compte que le chrono était loin de mes attentes, même si je n’avais pas d’objectifs très précis disons que le chrono ne correspond pas du tout aux classements des années précédentes. Bref je suis dans le dur et le chrono le confirme. Faire top 10 dans ces conditions c’est assez flatteur !
Sur l’île nouveau point d’eau, cette fois je m’arrête et prends le temps de boire 2 grands verres d’eau, je ne remplis pas les flasques, je ne sais pas faire et je sens que la maladresse ne sera que plus grande. La petite pause a fait du bien, et je m’aperçois qu’un concurrent devant est en train de craquer, je me rapproche de lui, il faut que je me motive pour relancer régulièrement, je ne le rattrape pas si facilement, mais cela m’aide pour ne pas complètement sombrer.
Enfin la ligne d’arrivée !
On sort de l’île, escalier de nouveau et avenue à traverser. Le gars que je rattrape passe, mais le feu passe au vert… pour les voitures, les bénévoles m’arrêtent, je peste, je le vois partir, je suis bloqué, agacé, mais en fait … ça fait du bien quand même ahah !! Je ne perds finalement pas beaucoup de temps, je perds surtout un peu le contact. On enchaîne avec une partie un peu pénible le long de la route, j’aperçois, pas trop loin, plusieurs concurrents, entre 100 et 300 m devant. Je pensais vraiment qu’ils étaient tous beaucoup plus loin.
Finalement il reste à peine 3km on arrive devant le parc Citroën, il y a un regroupement de tous les concurrents qui m’ont doublé depuis le km 17, le duo marche et les 2 autres sont ensemble mais n’avancent pas très vite. Surtout j’aperçois Amaël et François un peu plus loin, ça fait beaucoup de bien et puis je connais vraiment bien la fin du parcours, ça me rassure de savoir ce qu’il reste à faire. Je double donc les 4 concurrents (3+1 accompagnateur) d’un coup et je relance légèrement l’allure, il reste 2,5 km, j’suis de nouveau 5ème.
Amaël et François m’accompagnent pendant 500 m jusqu’au pont suivant, c’était le meilleur moment, super sympa de les retrouver, on papote un peu, j’oublie un peu l’état de fatigue, et puis surtout au pont de Beaugrenelle m’attendent ma femme et mon fils qui me tend une bouteille d’eau !! la meilleure eau du monde ! virage à 180° pour monter sur le pont ce qui permet de voir qu’il y a un bon écart avec les poursuivants, ça motive pour les 2 derniers km, se mettre à l’abri d’un sprint final pour conserver la place dans le top 5 ! Petite relance sur la dernière partie, même si plus trop de jambes, on était plutôt autour de 4’15/4’30 ce qui n’est quand même pas ouf pour une relance de fin de course ahah complètement carbo !
Je termine super content sur le pont de Iéna, Tour Eiffel dans le dos et super expérience derrière moi, avec une fin de course positive, plus au niveau du scénario qu’au niveau des sensations et du chrono. J’suis content de ne pas avoir lâché dans la deuxième partie de course, un an et demi sans dossard, j’avais envie de me rentrer dedans ! c’est fait !
Après l’arrivée, j’ai bu, bu, et encore bu, j’étais vraiment épuisé, à analyser… mais niveau hydratation et alimentation il y a mieux à faire, niveau entrainement aussi, il manquait certainement un peu de km au compteur. J’ai galéré pour rentrer chez moi, j’avais mal partout !! Mais pas de blessure et super content surtout d’avoir participé et terminé ce premier trail ! même si ce n’est pas encore un grand trail, ça fait un petit point eheh.
Place à la récup, et même si 1 h après le trail, comme après une bonne cuite je disais : « plus jamais », déjà, le lendemain, les courbatures ne sont pas si terribles et en écrivant ce compte rendu de course j’me laisserais bien tenter par un petit verre … à 3 points ?